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le vent nous portera
3 septembre 2014

Manset - un oiseau s'est posé -

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Il se fait si discret médiatiquement que chacune de ses parutions discographiques attise une indéniable curiosité. Pour son vingtième album, Un oiseau s'est posé, Gérard Manset se fraye une percée dans son abondant répertoire. Et pour cette remise au goût du jour d'anciens morceaux, il ne voyage pas totalement en solitaire. Ermite. Le mot revient de manière récurrente à propos de Gérard Manset. On serait même tenté d'y accoler l'adjectif énigmatique. Discret jusqu'à l'effacement, c'est un animal sauvage qui ne se laisse pas apprivoiser. Plus à l'aise dans sa misanthropie qu'en pleine lumière, il est homme qui ne se donne pas en spectacle, au propre – il n'est jamais monté sur scène (l'armée de téléphones en concert se voulant rédhibitoire pour lui) – comme au figuré. Presque un fantôme de la médiasphère. Manset parle peu, se cache derrière ses lunettes noires, se laisse difficilement prendre en photo, fuit les plateaux télé où il se montre fidèlement absent et refuse le podcast après chaque interview radio. Ne pas compter non plus trouver la trace d'un de ses morceaux sur un service d'écoute à la demande. Dans l'imagerie, il demeure opaque, sibyllin, en retrait. Lui se qualifie d'obsessionnel. Un marginal tant par ses options artistiques que par sa pratique du métier. Cet artiste, qui commet aussi roman et recueil de photos, semble ne se lancer dans un projet que si celui-ci est mû par une intense nécessité. Miracle du printemps. Le voilà qui sort de sa tanière six ans après Manitoba ne répond plus. Ce retour s'inscrit dans un nouveau contexte puisqu'il a quitté son historique maison de disques. Sous contrat avec EMI depuis 40 ans, il a désormais rejoint l'écurie Warner. Certainement parce qu'on lui a promis de lui ficher une paix royale. Signer Manset, c'est coup à sûr devoir accepter ses silences, ses réticences et ses désirs. La dernière volonté en question consiste en une relecture de son répertoire. Ou plutôt une "revisitation" selon ses propres termes. Il est donc parti en exploration au sein de ses dix-neuf albums. Un long chemin de mots et de notes qui donne le vertige. Les moins de 40 ans apprécieront peut-être Un oiseau s'est posé pour sa juste beauté, son écriture racée et lettrée. Mais sans doute n'ont-ils pas vraiment conscience de la portée discographique de Manset, de la place qu'il occupe dans le paysage musical hexagonal. Dans ce double album, l'auteur-compositeur-interprète redonne vigueur et agilité à une vingtaine de chansons, loin d'une approche nostalgique pesante. Au menu : une adaptation anglaise de son unique tube populaire (Il voyage en solitaire) en compagnie du guitariste américain Paul Breslin, une cornemuse et des guitares à la force tranquille sur Deux voiles blanches, un Entrez dans le rêve coloré de palettes moins pâlichonnes, un Matrice au son plus massif, un Genre humain qui surprend par son dépouillement. Gérard Manset ne s'est pas privé d'inviter quelques convives au festin. Dans la langue de Shakespeare, on retrouve Mark Lanegan (ex-Queen Of The Stone Age) pour une version souveraine d’Élégie Funèbre. La formation belge dEUS offre une cure de jouvence jubilatoire au morceau Animal on est mal, Axel Bauer place Celui qui marche devant sous tension et Raphael se glisse dans les teintes élégantes de Toutes choses. Quant aux réfractaires à la voix de Manset, qu'ils glissent une oreille : il n'a jamais aussi bien chanté.

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