Adrien Soleiman - Brille -

Quel que soit le style musical, l’époque est dédiée aux carrières fulgurantes d’artistes «surdoués» d’à peine 20 ans qui dès leur premier album fracassent tout, quitte à ne chanter qu’un seul été, grillés par la versatilité du public et de la critique. La trajectoire atypique d’Adrien Soleiman, 32 ans, le place d’emblée loin des clichés. Le parcours a été sinueux pour arriver à ce premier album, Brille, qui fascine tant par son ardeur à (re)construire une nouvelle chanson française dont les références musicales seraient plus proches de la pop anglaise d’aujourd’hui, à la Metronomy ou James Blake par exemple. Si le Parisien est bien un enfant de la balle, celle-ci est ovale. Le rugby fut sa première passion. Avant qu’il ne se mette pour de bon au jazz et au saxophone, avec comme héros John Coltrane et Stan Getz. A 17 ans, bye-bye le lycée, et c’est le début d’une carrière comme musicien de studio, ou sur scène pour différentes formations. Le tournant se situe en 2014 avec la séparation de son dernier groupe, Beau Women, qui lui donne, à tout juste 30 ans, l’impulsion pour enfin apparaître sous son propre nom. Le virage est radical pour quelqu’un qui ne se serait jamais imaginé en chanteur-auteur-compositeur, et qui avoue même n’avoir jamais terminé un livre de sa vie. Mais on ne le fera sûrement pas passer pour un inculte. Surtout lorsque l’on écoute attentivement ses textes radieux, même si empreints d’une poésie mélancolique et réaliste, piochée dans une inspiration fulgurante causée par le divorce tardif de ses parents et sa séparation avec sa petite amie. Tout ça l’année de ces fameux 30 ans, mazette ! L’instant idéal pour une mise à nu ardemment désirée dénommée Brille. Comme ses premières prestations scéniques ont mis en lumière non seulement Soleiman et son émouvante fragilité derrière la carrure de rugbyman, mais aussi la force du groupe qui l’accompagne, on parie que cette nouvelle étoile ne sera pas qu’éphémère.(libération)