Orkney symphony of the magnetic north

Un concept grave et imposant semble à l’origine de cet album, en hommage aux îles Orcades, qui dérivent au nord de l’Ecosse, terrorisées par les tempêtes et les légendes. Et on s’en fiche royalement, de ce concept aussi complexe que des écritures pictes – cet album pourrait rendre hommage à l’île de Fort Boyard qu’on lui ouvrirait les portes avec la même passion, la même inquiétude. Comme des BO existent pleinement en marge de leur film, cette symphonie pour mélancolie, sorcières et vents mauvais se passe largement de son concept de base. Elle lui a échappé. Il n’y a sans doute pas suffisamment d’habitants sur l’archipel pour tenir tous les instruments précieux qui enluminent ces chansons de brume maléfique, enveloppantes et toxiques. C’est d’ailleurs en route pour ces îles à la mythologie intense que la chanteuse folk Vashti Bunyan, dans les sixties, avait posé sa roulotte en Ecosse, après avoir laissé dans la nature un prototype de folk symphonique et fantomatique, Just Another Diamond Day. Visiblement, dans les Orcades, cette leçon de songwriting en fleurs fanées a fini le voyage sans elle : le musicien Erland Cooper (du très bon groupe Erland & The Carnival) y perpétue cette tradition orale, accompagné de l’arrangeuse/chanteuse Hannah Peel et du guitariste Simon Tong (The Verve, Blur, Gorillaz). Trois à la base, mais des dizaines d’âmes complices à l’arrivée, à la tête d’un fatras intense d’electro, de cordes, de cuivres et de déraison. D’où cette impression d’entendre une version hantée et cossue de la BO du film The Wicker Man original, entre transe païenne et veillée funèbre. Littéralement, ce groupe aux humeurs diaboliques peut vous faire perdre le Nord.(les inrock)